mercredi 6 octobre 2010

Revue de presse 28/09/10 - Fatiguée

Par quoi commencer ? Parce que je ne sais pas vous, mais moi, je suis fatiguée... Je suis fatiguée des luttes sociales, des luttes solidaires, des luttes écologistes, anti-xénophobes, anti-carcérales, anti-fraudes fiscales, anti-tutti quanti... Tenez, rien que cette semaine : mercredi, fête de l'indignation pour soutenir les Roms, jeudi, manifestation contre la réforme des retraites, samedi, rassemblement contre la loi Besson sur l'immigration... C'est un peu usant !

Mais il faut bien commencer par quelque chose, alors commençons par la loi Besson. Pourquoi? D'une part, parce que ce n'est pas moins que la cinquième loi sur l'immigration qui sera votée en sept ans et d'autre part, parce que les informations sur ce sujet sont quasiment inexistantes dans les médias, alors que la loi est débattue depuis ce mardi à l'Assemblée nationale.
En vrac, voici quand même quelques infos pêchées sur les sites de Mediapart et du Figaro. Ainsi, la loi prévoit d'instituer :
* l'allongement de la durée de rétention administrative de 32 à 45 jours
* la création d'une possible interdiction de retour sur le territoire de 2 à 5 ans (c'est les familles dont l'un des membres aura été expulsé qui vont être contentes!)
* la création de nouvelles zones d'attente (jusqu'à présent limitées aux aéroports) où les étrangers sont plus aisément expulsables
* la restriction de l'accueil pour soins médicaux : seuls pourront en bénéficier les étrangers dont les traitements en question ne sont pas disponibles dans leur pays d'origine (ce qui occulte la question de l'accès aux soins sur place, celles des moyens, etc.)
Sans oublier les dispositions qui ont été rajoutée depuis le mémorable discours présidentiel de Grenoble cet été :
* la déchéance de la nationalité pour des Français d'origine étrangère ayant porté atteinte à un représentant de l'autorité publique
* la possibilité d'expulser des ressortissants européens présents depuis moins de trois mois sur le territoire en cas de « menace à l'ordre public » (par « menace à l'ordre public », on entend entre autres « exploitation de la mendicité » et surtout « occupation illégale d'un terrain public ou privé », formule bien pratique pour bouter du Rom hors de France...)
Avec tout ça, ils ne seront pas nombreux ceux qui pourront prétendre au statut de travailleur français qui partira un jour à la retraite à 67 ans...

La retraite d'ailleurs, parlons-en ! Comme on commence à bien maitriser le sujet ces temps-ci, j'ai décidé de m'intéresser à ce qui me turlupinait encore, telle la question de la retraite par capitalisation, un sujet traité par le Politis du 23 septembre, dans un article intitulé « L'autre sale coup de la réforme».
La retraite par capitalisation? Mais kesako ? Ben voilà, dans notre actuel système par répartition, on prélève des cotisations sociales qui sont immédiatement reversées aux retraités. Mais dans un système par capitalisation, l'épargne individuelle est placée dans des institutions financières qui font travailler vos petits sous pendant toute votre vie active et vous seront reversés à votre retraite (si un jour...). Le problème, selon le magazine Politis, c'est « le caractère inégalitaire et la logique de ces fonds d'épargne qui cherchent à maximiser les rendements et prennent des risques sur les marchés financiers. La crise a pourtant infligé un cinglant démenti à ceux qui juraient que le rendement du système par capitalisation était supérieur à celui du système par répartition! » Et Politis de citer, avec Attac, le cas de l'Irlande, dont la valeur des fonds de pension a dégringolé de 38% en 2008... D'autre part, la capitalisation individualise le financement de la retraite, ne la rendant accessible qu'aux plus aisés, bien sûr... Une tendance qui satisfait les vœux même pas secrets du Medef puisque sa présidente, Laurence Parisot, l'avait explicitement réclamé à Éric Woerth... Bien sûr, cela n'a rien à voir avec le fait que celle-ci soit également administratrice de la BNP Paribas, une banque très favorable au système par capitalisation...
Autre sujet turlupinant (j'adore ce terme, pas vous?) : les femmes et la réforme. Elles étaient nombreuses, en effet, les féministes, à tracter dans les différents cortèges de jeudi dernier. Bien sûr, j'ai voulu en savoir plus... Mission réussie grâce à Mediapart qui revient, le 24 septembre, sur l'inégalité salariale, les interruptions de carrière, les parcours «hachés», l'importance du temps partiel subi pour les femmes... qui feront d'elles les premières « victimes » de la réforme! Ainsi, par exemple, 30% des femmes occupent aujourd'hui un emploi à temps réduit pour seulement 5% chez les hommes.
Dans l'article, Ana Azaria, présidente de l'association Femmes Égalité s'emporte : « La caissière qui s'abîme le dos... Les médecins du travail disent que se sont les caissières qui ont les maladies professionnelles les plus répandues au niveau du dos. Comment on arrive à être caissière à 67 ans? Ces femmes même, une bonne partie va être licenciée avant 60 ans. Comment faire? Sept ans de chômage ce n'est pas possible, elles vont se retrouver avec le RSA et donc avec des retraites misérables ». Des solutions, elle en a, Ana Azaria : « il faut taxer les dividendes, les dividendes se font grâce au monde du travail. Il faut aussi taxer les revenus financiers, les grandes fortunes. »

Au passage, puisque j'étais sur Médiapart, je ne peux pas me refuser un petit aparté sur la diatribe récente de Rémi Pflimlin à l'encontre du quotidien en ligne. Interrogé en public sur l'affaire Bettencourt, le tout nouveau et surtout tout premier directeur de France Télévision directement nommé par le Président de la République a ainsi affirmé que l'affaire aurait pu sortir sur le service public, « mais de manière plus sérieuse, et moins émotionnelle, moins manipulatrice et moins publicitaire que sur Mediapart », ainsi que « de façon plus respectueuse par rapport à des éthiques... » Et le directeur de France Télévision d'évoquer des « dérives à la Big Brother (...) dans un monde où tout circule n'importe comment »... Bravo ! On l'attendait au tournant et Rémi Pflimlin fonce dans le mur! Outre sa méfiance réactionnaire vis à vis du web, cette sortie confirme les inquiétudes des journalistes de France Télévision quant à l'indépendance de leur nouvelle direction vis à vis de l'État.
Dans la même veine, je vous recommande la lecture de l'enquête sur France Inter publiée le 23 septembre dans les colonnes de Télérama. En juin dernier, en effet, Jean-Luc Hees prenait ses fonctions de premier président de Radio France directement nommé par le chef de l'État et choisissait dans la foulée Philippe Val pour diriger France Inter. Et Télérama nous rappelle : « Deux heures après son installation, le nouveau directeur retire la revue de presse matinale à Frédéric Pommier, qui a eu la mauvaise idée de citer le concurrent et ennemi de Charlie Hebdo, Siné Hebdo... » Puis vient l'épisode Porte et Guillon, les deux humoristes renvoyés pour avoir un peu trop malmené les oreilles élyséennes... Une décision qui provoque une manifestation de près de 2000 auditeurs devant la Maison de la radio...
Demorand, Porte et Guillon partis, la matinale de cette rentrée sur France Inter est désormais insipide et lèche-bottes (c'est moi qui le dit, pas Télérama). Pourtant, Philippe Val persiste : « L'humour n'est pas le monopole des humoristes. Il y a des choses drôles qui se disent dans la matinale ». C'est vrai que l'imitateur Gérald Dahan qui anima un meeting de l'UMP en 2005 est à mourir de rire... C'est vrai que je me suis esclaffée quand Raphaël Mezrahi a démissionné après avoir tenu seulement huit jours... C'est vrai que j'ai beaucoup ri également quand, en pleine réforme des retraites, Audrey Pulvar, dans sa rubrique très sérieusement intitulée « la controverse » s'est excusée auprès de Laurence Parisot d'avoir mal préparé son interview! Hahaha...
Rassurez-vous, je ne terminerai pas ce billet d'humeur par un guillonnesque « j'encule Sarkozy », car je ne voudrais pas me faire virer de RCV ou de PFM...